La cathédrale de Strasbourg et ses sculptures

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Célèbre pour sa flèche emblématique de l’architecture gothique, la cathédrale de Strasbourg, visible des côtés du Rhin, présente un programme sculpté d’une grande richesse. Au début du XIIIe siècle, après avoir suivi des modèles rhénans, le chantier s’est tourné vers l’ouest. Bien que construite en terre d’Empire, la situation géographique de la cathédrale la rendait particulièrement sensible aux influences françaises.

Le maître du croisillon sud est considéré comme le premier maître gothique de l’édifice. L’extérieur, récemment restauré, comporte deux portails illustrant la Dormition et le Couronnement de la Vierge. La délicatesse des drapés aux plis mouillés de ces figures se retrouve également dans les statues de l’Eglise et de la Synagogue, se dressant de part et d’autre, et dont les originaux sont conservés aux Musée de l’Œuvre Notre-Dame

À l’intérieur de ce même bras sud du transept se dresse le Pilier des Anges. Consacré au Jugement dernier, il présente un programme sculpté sur trois niveaux. Les Évangélistes et les anges accompagnent le regard du fidèle jusqu’à la figure du Christ-Juge assis, sous les pieds duquel surgissent les Ressuscités. Cette oeuvre se distingue tant par la qualité de ses sculptures que par les importantes traces de polychromie toujours visibles.

Dans la nef, le jubé du milieu du XIIIe siècle se composait de sept travées voûtées d’ogives, jusqu’à sa destruction en 1682. Il ouvrait sur la nef par des arcades coiffées de gâbles. À l’intérieur de ces derniers, on pouvait observer le Christ-Juge et la représentation des Œuvres de Miséricorde. Certaines sculptures en pied des apôtres ont été retrouvées en 1893 à l’extérieur, sur l’octogone de la tour, avant d’être redescendues. En 1939, les divers vestiges ont été utilisés au Musée de l’Œuvre Notre-Dame dans la reconstitution de deux travées en pierre neuve. La Vierge du jubé, un temps conservée à Saverne dans la résidence épiscopale, puis dans des collections privées, est acquise après la Seconde Guerre mondiale par le Musée des Cloisters de New-York. Elle sera présentée devant la reconstitution du jubé en 2001, à l’occasion d’une exposition sur l’Iconoclasme.

La façade occidentale de la cathédrale, entreprise en 1277, présente une riche programme iconographique. Réalisés durant le dernier quart du XIIIe siècle, les portails sont consacrés, au nord, à l’Enfance du Christ avec la Psychomachie ornant les piédroits ; le portail central est occupé par la Passion du Christ, et des prophètes prennent place dans les ébrasements. Enfin, le portail sud laisse voir un Jugement dernier surmontant les Vierges sages et les Vierges folles accompagnées de l’Époux et du Tentateur. Ce dernier, à l’élégance tapageuse, arbore un sourire qui fait oublier les crapauds et serpents grouillant dans son dos. Il nous invite aussi à plonger dans ce récit de pierre, dont les rares traces de polychromie laissent imaginer l’effet saisissant que ces scènes fortement colorées devaient produire au Moyen Age.


Votre conférencière :

Anne Vuillemard-Jenn est docteur en histoire de l’art, enseignante et chercheur indépendant. Membre du Groupe de Recherches sur la Peinture Murale, elle poursuit des recherches sur la polychromie architecturale et la peinture monumentale.


Les dates à retenir :

Entre 1225 et 1235 : un nouvel atelier conçoit les portails du croisillon sud et le Pilier des Anges.

1277 : pose de la première pierre du massif occidental après l’achèvement de la nef.

1298 : les portails de la façade occidentale sont achevés.

1682 : destruction du jubé.

1843-1853 : des vestiges du jubé sont retrouvés enfouis dans le sol.

1862 : la cathédrale est classée Monument historique.

1893 : l’architecte Knauth identifie des sculptures du jubé sur l’octogone de la tour..

1988 : la Grand-île, dont fait partie la cathédrale, est inscrite au Patrimoine mondial de l’UNESCO.

2001 : le Musée des Cloisters consent le prêt de la Vierge du Jubé pour une exposition.

2020 : la Fondation de l’'Œuvre Notre-Dame, institution attachée à la conservation et la restauration de la cathédrale, figure au patrimoine culturel immatériel de l’UNESCO.


A lire pour aller plus loin :

Anne Vuillemard, Le Pilier des Anges de la cathédrale de Strasbourg : un cas de polychromie partielle ? », Bulletin de la cathédrale de Strasbourg, 2006, 27, p. 17-34. consultable en ligne sur www. academia.edu

Benoît van des Bossche, La cathédrale de Strasbourg. Sculpture des portails occidentaux, Picard, 2006.

Strasbourg. La grâce d’une Cathédrale, La Nuée bleue, 2013.

Sabine Bengel, Marie-José Nohlen et Stéphane Potier, Bâtisseurs de cathédrales : Strasbourg, mille ans de chantier, Strasbourg, La Nuée bleue, 2014.

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Anne Vuillemard
02_Histoire de l’art