Capri, l'île devenue légende
Lorsque qu’en 1961 Barbara chante Capri, elle célèbre l’une des plus belles et des plus légendaires îles de la Méditerranée. Une réputation vraiment démesurée au regard de la superficie de Capri : pas plus de 11 km2 ! Rien n’est moins sûr… Capri « la belle » se trouve dans le Golfe de Naples à quelques encablures de la péninsule de Sorrente dont elle est le prolongement géologique. Depuis la mer, elle se présente comme une muraille de calcaire gris, d’à-pics vertigineux et de criques sauvages. L’état de nature semble y régner en maître. Pas étonnant que l’entrée de Capri dans l’imaginaire humain et dans l’histoire ait débuté très tôt. Les Grecs en furent les artisans. Occupant l’île, ils lui associèrent la légende homérique d’Ulysse et des Sirènes. Capri serait donc l’île des Sirènes ? On peut le croire ou pas. Mais le mythe de Capri fut avant tout lié à deux empereurs romains, Auguste et Tibère qui furent subjugués par sa beauté ! Dès lors Capri devint leur lieu de villégiature et plus d’une douzaine de prestigieuses villas impériales auraient été construites sur l’île ! Les archéologues ne les ont pas encore toutes retrouvées mais quelle importance puisque la présence de l’Antiquité est traçable partout à Capri, c’est une part essentielle de son âme. On ne peut pas en dire autant de la période médiévale qui marque clairement une diminution de l’importance de l’île. C’est à la fin du XVIIIe siècle que Capri fut sortie de sa torpeur. C’était le temps des Bourbons, et d’un roi très porté sur la chasse aux cailles si nombreuses à Capri. C’était aussi l’époque de la découverte de Pompéi. La folie des fouilles qui s’empara alors des esprits toucha tout le golfe de Naples et donc Capri. S’ensuivirent des fouilles chaotiques et des trouvailles multiples qui encouragèrent d’autres fouilles toujours aussi chaotiques. Quelques fameuses villas romaines et des statues antiques furent sorties de terre. Ce fut aussi la découverte par des voyageurs étrangers de la fameuse « Grotte d’Azur », lieu de tous les enchantements…Une nouvelle étape dans l’histoire de Capri s’ouvrit alors, accompagnée de modifications des paysages, de construction d’hôtels plus ou moins fastueux, de routes carrossables et du développement du tourisme. Au début du XXe siècle, Capri « la mondaine » devint un lieu incontournable pour toute une élite cultivée d’écrivains, de poètes, d’artistes étrangers : Maxime Gorki, Curzo Malaparte, Jean-Paul Sartre et Simone de Beauvoir, Marguerite Yourcenar en firent partie. Certains furent de passage, d’autres décidèrent d’y rester. Il y eu aussi le temps des actrices hollywoodiennes : Liz Taylor, Ingrid Bergman, Audrey Hepburn…Chacun de ces moments contribua à graver dans le calcaire de l’île de nouvelles images à la fois superficielles et inoubliables et d’entretenir ainsi le mythe de Capri.
Votre conférencier :
Diplômé de l’École du Louvre et de l’université Paris-IV-Sorbonne, Fabrice Delbarre est Guide conférencier-national.
À lire pour aller plus loin :
Norman Douglas, Le pays des sirènes : Capri, Sorrente, baie de Naples, Gallimard, 1989.
Brigitte Marin (dir.), Naples, Citadelles-Mazenod, 2010.
Mario Soldati, Lettres de Capri, 2003, Livre de poche.
Jean-Luc Godard, « Le Mépris », Carlotta - Films, 2007 (DVD).