Architecture cistercienne. Le Thoronet, Sénanque et Silvacane : les trois sœurs provençales

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L’ordre cistercien trouve ses racines en 1098 dans la fondation du monastère de Cîteaux par le moine Robert de Molesme. Quelques années plus tard, Etienne Harding codifie la règle cistercienne. Saint Bernard de Clairvaux fait de ce monastère le centre de l’ordre cistercien, de 1115 et 1153. Fustigeant l’apparat de Cluny, il réaffirme la règle de saint Benoît. Il prône la rigueur stricte de l’ordre, où seuls le travail manuel et la prière doivent animer les cisterciens. Cîteaux s’élève contre Cluny, symbole de la pauvreté monastique pervertie.

Entre 1113 et 1115 sont fondées les quatre premières filles de Cîteaux : La Ferté, Pontigny, Morimond et Clairvaux. Ces abbayes vont également avoir une descendance nombreuse. Une fille tardive de Cîteaux, l’abbaye dauphinoise de Bonnevaux donne naissance en 1120 au monastère de Mazan, perdu dans la montagne du haut Vivarais ; de là partent en 1136 les moines fondant la première maison provençale, qui donne naissance au Thoronet, et en 1148 ceux qui s’installent à Sénanque. Silvacane est créée en 1144 par Morimond. On parle pour Le Thoronet, Sénanque et Silvacane des trois sœurs provençales. La pénétration des moines blancs en Provence est assez tardive par rapport à leur implantation dans d’autres parties de l’Europe.

Édifiée entre 1160 et 1230, l'abbaye du Thoronet illustre la simplicité et l’organisation rationnelle chères aux cisterciens. La pureté géométrique des volumes, le traitement maîtrisé de la lumière font dire à Le Corbusier lors d’une visite en 1953 : « À l'heure du "béton brut", bénie, bienvenue et saluée soit, au cours de la route, une telle admirable rencontre ».

Si aujourd’hui l’église de Sénanque ne peut plus être dissociée des champs de lavandes qui la flanquent, ceux-ci n’ont été plantés que dans les années 1970. Moins austère que Le Thoronet, l’abbaye présente un cloître dont les colonnes sont ornées de chapiteaux délicatement sculptés. Enfin, Silvacane permet d’observer l’apparition de formes gothiques en particulier dans son élégante salle capitulaire. Outre les églises, ces abbayes permettent en effet de découvrir la vie monastique. Autour du cloître rayonnent les bâtiments rythmant la vie des moines : la salle capitulaire, le réfectoire ou encore le dortoir. Et dans la simplicité de ces espaces raisonnent les mots de saint Bernard appelant à contempler les beautés invisibles.


Votre conférencière :

Anne Vuillemard-Jenn est docteur en histoire de l’art, enseignante et chercheur indépendant. Membre du Groupe de Recherches sur la Peinture Murale, elle poursuit des recherches sur la polychromie architecturale et la peinture monumentale.


Les dates à retenir :

1112 : saint Bernard entre à Cîteaux.

1153 : mort de saint Bernard.

1136 : fondation de la première maison provençale.

1144 : fondation de l’abbaye de Silvacane.

1148 : fondation de l’abbaye de Sénanque.

1160 et 1230 : construction de l’abbatiale de l'abbaye du Thoronet.

1175 à 1230 : construction de l’abbatiale de Silvacane.

2018 : l’église de Sénanque menace de s’écrouler.


À lire pour aller plus loin :

Eliane Vergnolle, L’art roman en France, Flammarion, 1994.

Georges Duby, L’art cistercien, Flammarion, 1989.

François Cali, L'Ordre cistercien, d'après les trois sœurs provençales, Sénanque, Silvacane, Le Thoronet, Hazan, 2005.

Yves Esquieu, L’abbaye du Thoronet, Caisse nationale des monuments historiques et des sites, 1995.

Hélène Morin-Sauvade et Carsten Fleischhauer, Sénanque, éditions Zodiaque, 2002.


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Anne Vuillemard
02_Histoire de l’art