Samouraïs, la voie de l’Arc et du Sabre

Image représentant la conférence  Samouraïs, la voie de l’Arc et du Sabre

Le samouraï, emblème historique du Japon, fait désormais partie de l'imaginaire collectif. Au XVIIe siècle, après une succession de guerres incessantes, s'ouvre enfin l'ère Edo (1603-1868). Durant cette période prospère, le seigneur guerrier, demeuré au sommet de la hiérarchie sociale, conserve une place importante dans la société japonaise. Il incarne au mieux les valeurs de loyauté, d'honneur, de courage et de droiture qui vont être codifiées dans "la voie du guerrier" (le fameux bushido).

Ces valeurs sont parfaitement illustrées par la "légende nationale" (et légèrement enjolivée !) des "47 Rônin" : 47 samouraïs sans maître qui décidèrent en 1701 de laver l'honneur de leur seigneur, Asano Naganori, condamné au suicide rituel par le pouvoir shogunal. Le destin tragique de ces vassaux fidèles fut mis en scène dans les multiples expressions de l'art japonais (estampes, théâtre kabuki, peinture...).

Le samouraï sut allier raffinement et arts de la guerre en transportant sur les champs de batailles des objets qui se devaient d'être esthétiquement parfaits : sabres longs katana, pointes kogai, éventails, armures et casques, etc. Par son armure complexe et sa maîtrise des techniques de combat, le samouraï est resté une source iconographique inépuisable pour les artistes contemporains, de la bande dessinée au cinéma, en passant par les jeux vidéo et les films d'animation mettant en avant des super-héros !


Votre conférencier :

Diplômé de l'École du Louvre et guide conférencier, Cyril Herrou est spécialisé dans l'histoire des Arts de l'Extrême Orient.


Les dates à retenir :

IIIème siècle av. J.-C.

Les premières armes connues font leur apparition au Japon.

Epoque de Heian 794-1185

Vers le XIIème siècle, le pouvoir impérial commence à décliner. C’est le début de la période féodale, appelée Chûsei au Japon.

Les seigneurs locaux - les daimyo (« grand nom ») – forment des armées.

De 1180 à 1185 a lieu la guerre de Genpei. Durant cette guerre civile, deux clans militaires s’affrontent : les Taira et les Minamoto.

Epoque de Kamakura 1192-1333

En 1192, Minamoto no Yoritomo se voit conférer par l’empereur Go-Shirakawa (77e empereur du Japon) le titre de shogun.

Le terme shogun est l’abréviation de seii-taishôgun qui peut être traduit par « grand général pacificateur des barbares ».

Le clan des Minamoto instaure le premier gouvernement militaire (bakufu) dans la ville de Kamakura.

L’époque Kamakura (1192-1333) voit l’émergence d’une nouvelle vie politique.

Les bushi (« guerrier gentilhomme ») domineront la période médiévale, reléguant l’empereur à un rôle de façade.

La période voit le perfectionnement des sabres à lame courbe et des doubles sabres. Les samouraïs sont les seuls autorisés à porter le daishô (« grand-petit »), un ensemble de deux sabres. L’épée en vient à incarner l’esprit même du guerrier. La « grande armure » (ô-yoroi) est l’emblème du pouvoir de l’élite militaire. Les militaires assument des fonctions politiques, développent une culture lettrée et philosophique. Ils patronnent également le bouddhisme zen. Cette école bouddhique met l’accent sur la méditation, prône l’autodiscipline spirituelle et insiste sur la force potentielle qui réside en soi-même, plutôt que dans le secours venu d’une divinité bienveillante.

Epoque de Muromachi 1333-1573

La période allant de 1477 à 1573 est connue, au Japon, sous le nom de période des « provinces en guerre » (Sengoku). Elle est marquée par les luttes entre les partisans de l’empereur et ceux du shogun.

La période est traversée par de nombreuses révoltes paysannes tandis que les seigneurs se retranchent dans leurs châteaux forts. Mais cette période voit paradoxalement l’essor du bouddhisme zen, de la cérémonie du thé.

Durant le XVIème siècle, l’usage des armes à feu se généralise. Celles-ci ont été apportées sur l’archipel par les marchands portugais.

Epoque d’Azuchi-Momoyama 1573-1603

Trois daimyo vont tenter de réunifier le pays : Oda Nobunaga (premier stratège à avoir utilisé méthodiquement les armes à feu au Japon) et ses deux lieutenants, Toyotomi Hideyoshi et Tokugawa Ieyasu.

Epoque d’Edo 1603-1868

Le clan des Tokugawa installe son bakufu à Edo (actuelle Tôkyô). Il unifie le pays et met fin aux guerres féodales.

Beaucoup de samouraïs se retrouvent sans maître et sont alors appelés rônin (« homme prison »). Ces figures de guerriers sans maître influenceront très fortement la littérature et le cinéma du Japon. L’époque d’Edo idéalise la figure du samouraï médiéval, lettré, qui suit le code d’honneur de la « voie du guerrier » (le bushido).

Avec l’usage des armes à feu et la fin des guerres féodales, les guerriers se tournent davantage vers la culture et l’enseignement. Dépourvues d’utilité militaire, les techniques de combat (bujutsu) deviennent plus théoriques et développent leurs philosophies.

Le 8 juillet 1853, les « navires noirs » du commodore américain Matthew Perry se postent à l’entrée de la baie de Tôkyô pour mettre fin à la politique isolationniste en vigueur au Japon (le clan des Tokugawac a officiellement fermé les frontières du pays en 1639). Cette intimidation permet l’ouverture des voies commerciales et les échanges avec l’Occident.

Les années 1853 à 1868 correspondent à la période du Bakumatsu ou de la fin du shogunat Tokugawa.

Elle se caractérise par des affrontements entre les partisans du shogunat et les loyalistes espérant redonner ses pouvoirs à l’empereur.

En 1868, les défaites du shogunat lors de la bataille de Boshin et de la bataille de Toba-Fushimi signent la fin des Tokugawa et de l’époque d’Edo.

Ere Meiji 1868-1912

Le Japon bascule dans l’époque moderne (Kindai).

Le 122ème empereur du Japon, Meiji, est restitué dans ses pleins pouvoirs. La capitale impériale est alors déplacée à Edo, rebaptisée Tôkyô (« capitale de l’Est »).

En 1876, acte symbolique fort, le port du sabre est interdit. Le système de rente des samouraïs est également aboli. C’est la fin de la société des samouraïs. Gangsters et yakuzas vont remplacer les samouraïs dans l’imaginaire populaire.

En 1899, Nitobe Inazô, éducateur et docteur en agronomie et en droit, publie Bushido, l’âme du Japon. Il décrit les « principes de l’homme de guerre éduqué » qui, selon lui, sont amenés à renaître. Ce livre teinté de nationalisme exalte l’image du samouraï médiéval dans un contexte expansionniste japonais.


À lire pour aller plus loin :

Mitsuo Kure, Samouraïs, Philippe Picquier éd., 2004.

Robert Calvet, Une histoire des samouraïs, Larousse, 2009.

Catalogue d'exposition "Armure du guerrier, armures samouraï de la collection Ann et Gabriel Barbier Mueller", Musée du Quai Branly, Paris, 2012.

Hélène Capodano Cordonnier, Aurélie Samuel, Samouraï, de la guerre à la voie des arts, Snoeck éd., 2017.

Catalogue d'exposition "L'arc et le sabre, imaginaire guerrier du Japon", Réunion des Musées Nationaux - Grand Palais, Paris, 2021.

Catalogue d'exposition "Ultime combat, arts martiaux d'Asie", Réunion des Musées Nationaux - Grand Palais, Paris, 2021.