Les réseaux étrusques en gaule méridionale

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© Arnaud Fafournoux

Aborder la question du rôle joué par les Étrusques en Gaule méridionale à la fin du premier et au début du second âge du Fer (soit entre la fin du VIIe et la fin du Ve s. av. J.-C.) implique la prise en compte d’un contexte plus global, qui est celui de l’ouverture progressive au monde méditerranéen des populations celtiques et ibériques qui occupent alors les régions comprises entre Alpes et Pyrénées. Dans cette zone, les dynamiques qui se font jour en Méditerranée durant l’époque archaïque se concrétisent à la fin du VIIe s. av. J.-C. par des traces – encore ténues et inégales d’une région à l’autre – de contacts avec les cultures grecque, étrusque, ou encore phénicienne.

Ces contacts se traduisent fondamentalement par des échanges de biens, et le golfe du Lion se révèle être un point d’attraction majeur pour les navigateurs méditerranéens. Les embouchures du Rhône, de l’Aude ou encore de l’Hérault apparaissent ainsi comme des axes privilégiés ouvrant sur un arrière-pays aux fortes potentialités, voire à des régions plus lointaines dont elles constituent le débouché. La recherche de métaux (cuivre, étain, argent…) a ainsi été longtemps invoquée pour expliquer cet attrait, mais d’autres biens ont à l’évidence été convoités. La fondation de Marseille par les Grecs phocéens aux alentours de 600 av. J.-C. marque la fin de cette période exploratoire et le début d’une nouvelle ère. Celle-ci voit se mettre en place rapidement un commerce régulier, structuré à partir d’un certain nombre de comptoirs littoraux, véritables interfaces potentiellement cosmopolites entre sociétés indigènes et monde méditerranéen.

La question d’une antériorité du commerce étrusque sur le commerce grec en Gaule méridionale a longtemps été débattue. À l’aune des dernières découvertes, il s’agira ici de reconsidérer cette question, en soulignant l’ambivalence des relations entretenues entre Tyrrhéniens et Phocéens. Tantôt partenaires, tantôt concurrents voire adversaires de ces derniers, les Étrusques ont quoi qu’il en soit joué un rôle actif dans ces réseaux économiques et probablement politiques, en particulier au VIe s. av. J.-C., moment de la plus grande diffusion sur le littoral gaulois de leurs amphores à vin accompagnées de vases à boire en bucchero nero et de vaisselle métallique.

Enfin, est posée la question de leur présence physique en Gaule méridionale. Bien que certain, le passage ou le séjour temporaire de marchands sur tel ou tel site faisant office de lieu d’échange n’est perceptible qu’à partir d’indices souvent ténus. En revanche, la fondation d’un véritable comptoir étrusque à Lattes (Hérault) à l’embouchure du Lez, longtemps pressentie, est désormais mieux documentée et ouvre de nouveaux questionnements quant à l’implication des cités étrusques dans les dynamiques qui animent le bassin nord-occidental de la Méditerranée aux VIe-Ve s. av. J.-C.

Les dates à retenir :

-610/-590 : diffusion des premières amphores étrusques en Gaule méridionale

-600 : les Phocéens fondent Massalia (Marseille)

-580 : fondation de l’emporion de Gravisca, port de la cité étrusque de Tarquinia

-575/-525 : période de diffusion maximale des amphores et du bucchero étrusque en Gaule méridionale

-540 : bataille navale au large d’Alalia (Corse) opposant les Grecs phocéens à une coalition étrusco-carthaginoise

-540/-530 : Marseille développe sa viticulture et diffuse ses amphores en Gaule méridionale

-535 : les Phocéens quittent la Corse et fondent Hyélè (Velia) en Campanie

-525/-500 : fin des importations de bucchero nero en Gaule méridionale

-510/-500 : fondation d’un comptoir étrusque à Lattara (Lattes)

-480 : défaite carthaginoise lors de la bataille d’Himère, face à Gélon, tyran de Syracuse

-480/-470 : destruction de la première Lattara

-474 : défaite étrusque lors de la bataille navale de Cumes, face à Hiéron I, tyran de Syracuse

-425 : le commerce de vin étrusque dans le sud de la France devient sporadique


A lire pour aller plus loin :

Michel Bats : Marseille archaïque. Étrusques et Phocéens en Méditerranée nord-occidentale, Mélanges de l’École française de Rome-Antiquité, 110-2, 1998, p. 609-633.

Eric Gailledrat, A. Vacheret : Lattes/Lattara (Hérault), comptoir étrusque du littoral languedocien, Gallia, 77-2 (2020), p. 1-32.

Christian Landes (éd.) : Les Étrusques en France. Archéologie et collections. Catalogue de l’exposition, Musée de Lattes, Lattes, IMAGO, 2003, 416 p.

Denis Lebeaupin (dir.) : Les origines de Lattara et la présence étrusque. Les données de la zone 27, Lattes, ADAL, 2014 (coll. Lattara, 22), 347 p.

Michel Py : Les Étrusques, les Grecs et la fondation de Lattes, in P. Arcelin, M. Bats, D. Garcia, G. Marchand, M. Schwaller (éd.), Sur les pas des Grecs en Occident. Hommages à André Nickels, Paris-Lattes, Errance-ADAM, 1995 (coll. Études massaliètes, 4), p. 261-276.

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Eric Gailledrat
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