Les Giacometti, portrait d'une lignée d'artistes

Si les sculptures filiformes et les dessins à mille traits d’Alberto Giacometti nous sont assez bien connus, les réalisations de ses frères, père et oncle le sont beaucoup moins. Car les Giacometti furent véritablement une famille d’artistes dont les discussions et correspondances ont nourri pendant des années les créations des uns et des autres.

La peinture colorée postimpressionniste de Giovanni sera la première référence de ses fils tandis que celle abstraite et décalée de leur oncle Augusto, membre de Dada à Zurich, leur ouvrira de nouveaux horizons. Cet entourage familial se double de celui amical des peintres Cuno Amiet et Ferdinand Holder, parrains d’Alberto et de Diego. Dans ces conditions, il n’est pas étonnant que les trois fils Giacometti se soient tournés vers l’art : Alberto fut le peintre et le sculpteur que nous connaissons, Diego fut également sculpteur et designeur tandis que Bruno devint architecte.

La découverte de cette lignée d’artistes se fera à travers l’histoire et la création d’Alberto Giacometti qui a si souvent dépeint les membres de sa famille, leurs lieux de vie et de travail et qui fut un véritable trait d’union entre tous ces artistes.

Image : Paolo Monti - Servizio fotografico (Venezia, 1962).

Votre conférencière :

Nathalie Douay est historienne de l'art et conférencière nationale.

Les dates à retenir :

1901 : naissance à Borgonovo en Suisse d’Alberto Giacometti. Il est le fils ainé d’Annetta Stampa et de Giovanni (1868-1933), lui-même peintre et graveur qui le motivera à s’intéresser à l’art.

L’année suivante, nait Diego, suivi en 1904 par Ottilia et en 1907 par Bruno. Les trois fils mèneront des carrières artistiques.

1906 : Giovanni installe un atelier à Stampa, à quelques kilomètres de Borgonovo, qu’il occupera pendant des années seul, puis avec ses fils.

1913 : Alberto réalise ses premiers portraits, dans le style post-impressionniste de son père. A la fin de l’année suivante, il réalise ses premières sculptures.

1922 : il s’installe à Paris, dans l’atelier d’Alexandre Archipenko dont il avait admiré les œuvres deux ans plus tôt, lors d’un séjour à Venise. Il fréquente également l’atelier d’Antoine Bourdelle avec qui il travaille pendant cinq ans à l’académie de la Grande Chaumière.

1925 : tandis qu’il expose pour la première fois au salon des Tuileries, Diego le rejoint à Paris. Quelques mois plus tard, ils s’installent ensemble dans l’atelier de la rue Hippolyte-Maindron qu’Alberto utilisera jusqu’à sa mort. Les deux frères, peintres et sculpteurs réalisent ensemble des œuvres décoratives et des bijoux pour de prestigieux commanditaires. Alberto expose régulièrement aux salons et obtient des contrats de galeristes (Jeanne Bucher, Pierre Loeb).

Les années 1930 sont marquées par la fréquentation des artistes et écrivains du groupe des Surréalistes qu’Alberto rejoint jusqu’en 1934, date à laquelle il se tourne vers un art d’après nature autant dans sa sculpture que dans sa peinture ; les deux expressions se nourrissant l’une l’autre.

1945 : après les années d’Occupation, Alberto peut regagner son atelier parisien que Diego a protégé. L’année suivante, il emménage avec Annette rencontrée trois ans plus tôt à Genève. Ils se marient en 1949. Ses années-là, il réalise ses hautes figures filiformes qui le feront connaître les décennies suivantes.

1962 : il participe à la Biennale de Venise. Il mène depuis plusieurs années une carrière internationale et est comblé d’honneurs bien qu’il vive toujours dans une grande simplicité.

1965 : décès d’Alberto Giacometti en Suisse. Après sa disparition, Diego qui s’était beaucoup occupé de l’œuvre de son aîné, redouble de travail et produit d’importantes réalisations pour des décorateurs renommés et des ensembles mobiliers comme le musée Marc Chagall à Nice ou le musée Picasso à Paris.

1985 : décès de Diego Giacometti.

1993 : création de la Fondation Alberto et Annette Giacometti à Paris.

À lire pour aller plus loin :

Beat Stutzer et Peter Knapp, Les Cinq Giacometti, Éditions du Chêne, 2017.

Alberto Giacometti, Pourquoi je suis sculpteur, Fondation Giacometti, 2016.