Riga, cité convoitée au superbe patrimoine Art Nouveau

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Développée à l'embouchure de la Daugava dans le golfe qui porte son nom, Riga est une ville portuaire tentaculaire ouverte sur la mer Baltique. Elle doit à cette situation géographique stratégique ses importants développements économique et urbain ayant fait d'elle une plaque tournante du commerce régional. Cette histoire se reflète dans un riche patrimoine bâti, classé par l'Unesco, faisant la fierté de ses quelques 700.000 habitants : Riganais, Riganaises, ou Rigois, Rigoises (à vous de choisir). Les styles gothique (cathédrale du Dôme), maniériste du Nord (Maison des Têtes Noires) y sont particulièrement bien représentés, mais c'est surtout à ses édifices Art Nouveau (rue Albert) que Riga doit son attractivité internationale.

Bien que son territoire ait été depuis longtemps fréquenté par diverses peuplades baltes, ce n'est qu'à l'aube du XIIIème siècle, en 1201 officiellement, que Riga est établie par l'évêque Albert de Buxhövden. Il fait de la ville naissante un évêché dont il occupe la charge. L'acte fondateur de cet ecclésiastique originaire de Saxe trouve place dans un contexte plus large d'expansion germanique. Il est à la fois missionnaire – il s'agit de « christianiser les derniers païens d'Europe » – et migratoire : le Drang nach Osten (« poussée vers l’Est ») qui voit de nombreuses populations germanophones s'établir dans l'Est européen et sur les rives de la mer Baltique. Dans les faits, il s'agit d'une colonisation dont le bras armé est le corps des Chevaliers du Porte-Glaive (Ordre de Livonie plus tard) composé de « moines-soldats » d'origine allemande, et qui a été institué par le même Albert de Buxhövden dans un esprit de croisade. A son origine, Riga apparaît donc comme une ville germano-balte où la grande majorité de la population est de langue allemande, et qui le restera jusqu'à la seconde moitié du XIXème siècle.

L'adhésion de Riga à la Ligue hanséatique en 1282, vaste coalition commerciale de cités germanophones riveraines de la mer Baltique, va renforcer l'intégration de la ville à l'espace allemand, mais elle va surtout contribuer à son remarquable essor économique. Par son port et le trafic maritime qu'il permet, Riga relie les espaces d'Europe orientale, centrale et occidentale. Son potentiel économique, et l'influence politique que ce dernier octroie à la cité, sont tels que les puissances émergentes de l'Europe du Nord et de l'Est la convoitent. Riga, et la Livonie son hinterland, tombent ainsi successivement en possession de la Suède (1621) puis de la Russie (1721). Cette dernière la conserve jusqu'au début du XXème siècle, puis encore durant la Guerre Froide, amenant l'installation d'une importante minorité russophone dans la ville.

Ce n'est qu'avec l’industrialisation de la fin du XIXème siècle qui fait appel à une main-d’œuvre nombreuse issue des campagnes environnantes s'installant dans les faubourgs ouvriers que l'on peut parler de « lettonisation » de la ville. Ce mouvement de population est concomitant du réveil national letton dans le courant du XIXème siècle, comme l'illustre bien l'organisation en 1873 du premier festival national de chant par la Société Lettone de Riga (RLB). Ce processus qui affirme l'identité balte de la cité trouve sa consécration en 1918 avec la création de la République indépendante de Lettonie avec Riga pour capitale. La 2ème guerre mondiale et la période soviétique qui a suivi n'ont pas modifié cette situation.

« Qui peut épuiser les chansons en chantant,

Qui peut épuiser les paroles en parlant ?

Qui peut compter toutes les étoiles dans le ciel,

Ramasser tout le sable de la mer ? »

Daina (chant traditionnel de Lettonie).


Votre conférencier :

Après une formation universitaire en histoire et en socio-anthropologie, Arnaud Hédouin se consacre à l'activité de guide-conférencier. À ce titre, il accompagne des groupes à l'étranger depuis plus de vingt ans avec l'ambition de faire découvrir l'histoire, la culture mais aussi les structures sociales des pays visités.


Les dates à retenir :

1201 : fondation officielle de la ville de Riga par l'évêque Albert de Buxhoeveden.

1282 : Riga intègre la Ligue Hanséatique.

1330 : fondation du château de Riga.

1561 : Riga adopte la Réforme luthérienne.

1621 : le roi de Suède Gustave II Adolphe prend possession de Riga.

1721 : traité de Nystad, la Livonie et Riga passent sous domination russe.

1873 : la Société Lettone de Riga (RLB) organise le premier festival national de chant.

1918 : Riga devient capitale de la Lettonie indépendante.

1991 : après la période soviétique, Riga et la Lettonie recouvrent leur indépendance.

2014 : Riga capitale européenne de la culture.


À lire pour aller plus loin :

Janis Krastins, Sur les traces de l'Art Nouveau à Riga, CIVA Éditions, 2006.

Suzanne Champonnois et François de Labriolle, La Lettonie, Karthala, 1999.

André Filler, L'impossible nation lettone. Étude des lieux d'une nation post-soviétique, Presses Universitaires de Strasbourg, 2016.

Oswalds Zebris, À l'ombre de la Butte-aux-Coqs, Agullo, Villenave-d'Ornon, 2020.

Jean-Paul Kauffmann, Courlande, Fayard, 2009.