À la découverte du musée de l’Alta Rocca à Levie

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Antique terre des seigneurs, pays de forêts et de torrents, l’Alta Rocca est le cœur historique et la perle sauvage du sud de la Corse. Ecrin de nature coincé entre les hauts plateaux d’estive du Cuscionu, les aiguilles de Bavedda, le massif de l’Uspedali et les montagnes de Cagna, elle est riche de particularismes et fière de son identité. Implanté au centre du village de Livia (Levie), le musée de l’Alta Rocca permet aux visiteurs et aux scolaires de découvrir les caractères géologiques, historiques et culturels de la microrégion, à travers une galerie présentant les vestiges issus de fouilles archéologiques et des expositions consacrées aux ressources du territoire et à l’art contemporain.

Le musée de l’Alta Rocca propose la découverte de la vie quotidienne dans le sud de la Corse durant les grandes périodes de l’Histoire.


Votre conférencier :

Après des études en France (Aix-en-Provence) et Italie (Università degli Studi di Sassari, Sardaigne), Kewin Peche-Quilichini soutient en 2011 sa thèse de doctorat en co-tutelle avec l’Università di Roma I « La Sapienza ». Ses recherches portent sur les sociétés insulaires de Méditerranée occidentale (Corse-Sardaigne-Baléares) à l’âge du Bronze et au premier âge du Fer. Il est responsable d’opérations de fouilles dans les sites suivants : Cuciurpula, Nuciaresa, Monti Barbatu, Cucuruzzu, Puzzonu.


Les dates à retenir :

Le Mésolithique (-9000/-6000) : les premiers corses.

Le premier peuplement connu de la Corse se fait vers -9000, avec l’arrivée de petits groupes par bateau. Afin de se nourrir, ces communautés pratiquent la prédation (pêche, piégeage, collectes diverses). Pour fabriquer leurs outils, ils utilisent des ressources essentiellement locales. Probablement nomades, ils occupent des abris naturels ou établissent des campements de plein air. Quelques tombes en grotte illustrent des pratiques funéraires complexes. Ces populations semblent disparaître vers -6400.

Le Néolithique (-6000/-2000) : producteurs et bâtisseurs.

Vers -5800, d’autres hommes abordent en Corse. Ils sont porteurs d’un mode de vie néolithique, c’est-à-dire qu’ils produisent leur nourriture grâce à la domestication des espèces animales (élevage) et végétales (agriculture). Parmi les autres innovations, figurent la poterie en terre cuite et l’installation des communautés dans de véritables villages. Les ressources nécessaires à l’industrie sont locales ou importées de Sardaigne (silex, obsidienne). La métallurgie apparaît à la fin de la période. Celle-ci est également marquée par les premiers développements du mégalithisme.

L’âge du Bronze (-2000/-800) : fortifications et héros-guerriers.

Dès le début de l’âge du Bronze, le sud de la Corse se couvre d’habitats fortifiés, les casteddi, alors que le territoire est ponctué de menhirs et statues-menhirs. Ces dernières représentent des chefs portant des attributs guerriers. L’apparition de ces élites, dont le pouvoir se fonde sur le contrôle des réseaux d’approvisionnement en métal et sur les capacités de stockage des ressources alimentaires, répond à un climat de tension. Du fait de nouveau besoins (cuivre, étain, verre), les relations maritimes à distance se développent. Les sites de Cucuruzzu et d’Araghju constituent des exemples d’habitats de cette époque.

L’âge du Fer (-800/-200) : de l’essor des villages aux premières colonisations.

Les fortifications sont abandonnées dès la fin de l’âge du Bronze, au profit de grands villages constitués de dizaines de petites maisons de forme ovalaire, tel Cuciurpula. A cette époque, les différentes populations corses semblent vivre en relative autarcie. Quelques objets d’importation originaires de Sardaigne et d’Etrurie sont toutefois retrouvés dans les tombes. Les premiers objets en acier apparaissent vers -700. A partir de -550, les Corses sont amenés à cohabiter avec les colons installés sur la côte orientale : Grecs, Etrusques puis Romains. Ces derniers achèvent la conquête de l’île au IIIe siècle av. J.-C.

De l’Antiquité à l’époque moderne (-200/1700) : une histoire tourmentée.

L’Alta Rocca constitue une région reculée et peu fréquentée durant l’Antiquité. Il faut attendre le milieu du Moyen Âge pour voir des villages, des églises et des châteaux (Capula, Roccataddata) s’y multiplier. La microrégion devient même la terre d’élection des seigneurs du sud de l’île, dont le plus célèbre reste Rinucciu della Rocca. A la chute des féodaux, le pouvoir est repris par l’administration génoise, qui fait raser les forteresses des Cinarchesi. Commence alors une époque troublée par les incursions barbaresques. Ce n’est qu’à partir de 1600 que l’Alta Rocca connaîtra une paix qui durera jusqu’en 1914…

L’époque contemporaine (1700/aujourd’hui) : un monde rural.

L’Alta Rocca est un pays de bergers, d’agriculteurs et d’artisans, un espace rural parsemé de villages constituant des petites communautés installées à flanc de montagne. La vie de tous les jours y est rythmée par des travaux qui forgent un quotidien quasi immuable en apparence, malgré les transformations qui touchent la Corse aux XVIIIe siècle. Ce monde disparaît au cours du XXe siècle sous les coups des conflits mondiaux, de l’exode rural et du tourisme, qui transforment la région en espace reconquis par la nature mais riche de son passé et de son identité.


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Kewin Peche-Quilichini
01_Histoire