Ku Klux Klan

Image représentant la conférence  Ku Klux Klan

Le 4 juillet 1868, à Shelbyville, dans le Tennessee, des hommes se présentent chez le directeur d’une école qui scolarise des enfants noirs, lui font baisser son pantalon et relever sa chemise, et le fouettent. En décembre 1922, en Louisiane, deux jeunes sont retrouvés morts, écrasés par un engin de chantier. Le 23 janvier 1957, alors que Willie Edward Jr. conduit la camionnette d’un ami, noir comme lui, il est enlevé par des hommes qui le torturent puis le forcent à se jeter d’un pont. Son ami est soupçonné d’avoir eu une relation amoureuse avec une Blanche, et ils l’ont pris pour lui. En septembre 1953, une bombe explose dans une église de Birmingham, dans l’Alabama, et quatre jeunes filles sont tuées. En juin 1964, trois militants des droits civiques, un Noir et deux Blancs, disparaissent dans l’État du Mississippi. Tués à bout portant et enterrés sur place.

Il ne s’agit là que de quelques exemples des exactions commises par le Ku Klux Klan sur une période d’un siècle, alors que les autorités et les systèmes judiciaires des États du Sud préfèrent détourner les yeux. L’« Empire invisible », comme le surnomment ses membres, épouvante autant qu’il fascine par son aura et son opacité. Cérémonies secrètes et sulfureuses, coiffes pointues et robes blanches, vocabulaire et titres ésotériques, croix en feu, inflexible suprémacisme et américanisme à 100 % : autant d’éléments qui font son succès.

Mais bien loin d’être une organisation monolithique et continue dans le temps, le Ku Klux Klan a connu trois vies. Créée par quelques anciens soldats du Sud après la Guerre de sécession, il disparaît après seulement quelques années. Puis il renaît en 1915, pour atteindre son apogée au milieu des années 1920, avec plusieurs millions de membres. Puis à nouveau il décline jusqu’à presque disparaître à la fin de la décennie, pour ressusciter dans les années 1950 et 1960, au moment du mouvement pour les droits civiques.

Presque inexistant depuis plusieurs décennies, le Ku Klux Klan est-il définitivement entré dans l’histoire, ou peut-il réapparaître une nouvelle fois tel le Phoenix ?

Image : AFP


Votre conférencier :

Didier Combeau, agrégé et docteur en civilisation américaine, est essayiste et spécialiste des États-Unis. Ses recherches portent sur les questions de violence et plus généralement sur la politique intérieure. Il a notamment publié Des Américains et des armes à feu : démocratie et violence aux États-Unis (Éditions Belin) et Polices Américaines (Gallimard). Son dernier ouvrage, Être Américain aujourd’hui : les enjeux d’une élection présidentielle, est paru en juin 2020 aux éditions Gallimard.


Les dates à retenir :

1865 : Création du Ku Klux Klan par six anciens soldats confédérés à Pulaski, dans le Tennessee. Des groupes similaires se développent rapidement dans un Sud meurtri par la guerre et inquiet du bouleversement de l’ordre social. Ses membres multiplient les exactions envers les Noirs et envers les Blancs favorables à leur émancipation.

1867 : Le Ku Klux Klan réunit une convention à Nashville, Tennessee, et se donne des statuts. Le général sudiste Nathan Bedford Forrest est élu Sorcier impérial.

1869 : Nathan Bedford Forrest annonce la dissolution du Klan.

1871 : Le Congrès fédéral adopte une loi anti-Klan.

1915 : William J. Simmons recrée le Ku Klux Klan sur la Stone Mountain, près d’Atlanta, en Géorgie.

Années 1920 : Grâce au recours à deux publicistes, le Ku Klux Klan enregistre des millions d’adhésions. Ses effectifs culminent au milieu de la décennie et déclinent ensuite. 30 à 40 000 klansmen en robe blanche et coiffe défilent à Washington.

Années 1950 et 1960 : Plusieurs groupes prenant le nom de Ku Klux Klan se reforment à la suite de la décision de la Cour suprême de mettre fin à la ségrégation, et dans le contexte de la lutte pour les droits civiques. Plus de 70 attentats à la bombe ont lieu en Géorgie et dans l’Alabama, une trentaine d’églises sont incendiées dans le Mississippi et 10 personnes sont tuées dans le seul État de l’Alabama. Le FBI s’efforce d’infiltrer le Klan.

1965 : À la demande du président Johnson, le Congrès mène une enquête sur le Ku Klux Klan. Trois dirigeants sont condamnés pour outrage au Congrès et passent une année en prison.

1987 : United Klans of America, une des plus grandes organisations du Ku Klux Klan à l’époque, est condamné par un jury populaire à verser 7 millions de dollars à Beulah Mae Donald pour le lynchage de son fils Michael en 1981. Le jugement cause la faillite de l’organisation.

2017 : Des militants se réclamant du Ku Klux Klan participent à l’organisation d’une protestation contre le déboulonnage de la statue du général sudiste Lee à Charlottesville (Virginie). Une voiture bélier conduite par un suprémaciste tue une participante à la contre-manifestation et blesse 19 personnes.


À lire pour aller plus loin :

Farid Ameur, Le Ku Klux Klan, Larousse, 2009.

Stetson Kennedy, J’ai appartenu au Ku Klux Klan, Editions de l’Aube, 2006.

Southern Poverty Law Center, « Ku Klux Klan: A History of Racism and Violence », 2011.

Films The Birth of a Nation (D. W. Griffith, 1915), Mississippi Burning (Alan Parker, 1988) et BlacKkKlansman (Spike Lee, 2018).



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Didier Combeau
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