La bataille de Cannes, un triomphe inutile

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La seconde moitié du IIIème siècle av. J.-C. est toute entière dominée par les guerres impitoyables que se livrèrent les deux grandes puissances qui se partageaient alors le bassin occidental de la Méditerranée : Rome et Carthage.

Les deux cités – que tout ou presque opposait – se livrèrent une première guerre entre 264 et 241 av. J.-C. au terme de laquelle Carthage dut céder à sa rivale ses possessions de Sicile, de Corse et de Sardaigne. Un véritable crève-cœur pour la thalassocratie punique qui perdait ainsi ses précieux points d’appui en Méditerranée.

Les épreuves de la cité punique n’étaient pas terminées pour autant car Carthage, amoindrie par la défaite, dut encore affronter ses mercenaires révoltés. Flaubert s’est inspiré de ces dramatiques évènements pour écrire un superbe roman, Salammbô, qui commence ainsi : « C’était à Mégara, faubourg de Carthage, dans les jardins d’Hamilcar… ».

Hamilcar justement, l’un des meilleurs généraux carthaginois de la première guerre punique, ne voulut pas accepter la défaite. Aussi, s’attacha-t-il à restaurer les bases de la puissance de sa cité. Pour se faire, Hamilcar conquit un vaste domaine en Hispanie dans les années 30 du IIIème siècle avant J.-C.

C’est depuis le domaine espagnol de Carthage que son fils, Hannibal, lança en 218 av. J.-C. son armée à l’assaut de Rome pour une guerre de revanche qu’il espérait courte.

Sa stratégie ?

Infliger à Rome, dans son pré carré italien, une défaite décisive qui contraigne l’orgueilleuse cité à demander la paix.

Au soir de la bataille de Cannes, qui eut lieu le 2 août 216, Hannibal pouvait légitimement pensé avoir partie gagnée. Ne venait-il pas d’anéantir la plus puissante armée que Rome ait jamais rassemblée ? Ne venait-il pas de démontrer un tel génie tactique que sa victoire sera analysée dans toutes les écoles militaires plus de 2 200 ans plus tard ?

Et pourtant, malgré ce succès retentissant, c’est bien Rome qui finit par l’emporter en 202 av. J.-C. après 17 ans d’une lutte sans merci.

Dès lors, il nous faut nous interroger à la fois sur la conduite de cette bataille mais également sur les raisons qui en réduisirent la portée… à presque rien.


Votre conférencier :

Laurent Lanfranchi est historien et directeur de Storia Mundi.


Les dates à retenir :

246 av. J.-C. : naissance d'Hannibal.

241 av. J.-C. : fin de la Ière guerre punique.

237 : Hamilcar se rend en Espagne avec son fils, qui y prête son célèbre serment.

229 : mort d'Hamilcar, auquel succède Hasdrubal l'Ancien.

226 : traité de l'Èbre.

221 : mort d'Hasdrubal : Hannibal devient commandante en chef.

219 : siège et conquête de Sagonte.

218 : début de la guerre. Hannibal traverse les Pyrénées et les Alpes. En hiver, il remporte les victoires du Tessin et de la Trébie.

217 : Hannibal traverse l’Apennin. Il écrase les armées romaines sur les rives du lac Trasimène. Fabius Maximus est nommé dictateur.

216 : Bataille de Cannes. Durant la même année, des cités grecques de Sicile se révoltent contre le contrôle politique des Romains. La défaite force les consuls à adopter la tactique de refus de toute bataille rangée contre Hannibal par Fabius Maximus.

215 : Traité d’alliance entre Hannibal et Philippe V de Macédoine.

212 : Rome s’empare de Syracuse.

211 : Hannibal se présente sous les murs de Rome.

207 : Hasdrubal, le frère d’Hannibal, est vaincu et tué à la bataille du Métaure alors qu’il tentait de rejjoindre son frère avec une armée de renfort.

206 : La victoire de Scipion à Ilipa permet à Rome de s’emparer des dernières possessions puniques en Espagne.

205 : Philippe V conclut avec Rome la paix de Phoïnikè.

202 : Hannibal – rappelé d’Italie – est défait à l’automne par Scipion à la bataille de Zama. Epuisée, Carthage, demande la paix.

204 : Scipion débarque en Afrique où il gagne le soutien du roi des Numides, Massinissa.


A lire pour aller plus loin :

Giovanni Brizzi, Moi, Hannibal… Mémoires d’un homme de guerre hors du commun, Les Éditions Maison, 2007.

Habib Boularès, Hannibal, Perrin, 2000.

François Hinard (dir.), Dominique Briquel, Giovanni Brizzi et Jean-Michel Roddaz (préf. François Hinard), Histoire romaine, t. I : Des origines à Auguste, Paris, Fayard, 2000, 1 075 p. (ISBN 978-2-213-03194-1), chap. XI (« La deuxième guerre punique »).

En italien :

G. Brizzi, Scipione e Annibale. La guerra per salvare Roma, Laterza Ed., 2007.

G. Brizzi, Canne. La sconfitta che fece vincere Roma, Il Mulino, 2016.


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Laurent Lanfranchi
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