Mazarin (1602-1661), une collection princière

Étudier Mazarin, d’un point de vue politique ou psychologique demeure une véritable gageure. Homme d’Etat implacable qui poursuivit l’œuvre absolutiste entreprise par Louis XIII et Richelieu ; mentor du jeune Louis XIV à qui il inculqua la notion de devoir d’État et de dissimulation, il se pose aussi comme une énigme ayant dilapidé sans vergogne les caisses de l’État afin de satisfaire son goût du Beau. Aujourd’hui, sa formation politique ne nous importe que de loin, car s’il y eut des modèles politiques, il y eut également, dans le cas de Mazarin, des modèles en matière artistique. Rome entre 1620 et 1630 est celle des papes mécènes de Grégoire XV Ludovisi (1621-1623), puis d’Urbain VIII Barberini (mécènes du Dominiquin, du Guerchin, Andrea Sacchi et Pierre de Cortone). C’est aussi l’une des capitales des collections prestigieuses au sein desquelles se côtoyèrent les antiques et la peinture, notamment à travers les collections Ludovisi ou du banquier genevois Vincenzo Giustiniani. Il s’agissait là de « padroni » successifs qui jouèrent incontestablement un rôle décisif dans la formation du cardinal. Mais l’influence des Sacchetti fut certainement plus déterminante, lui permettant notamment de rentrer en relation avec Pierre de Cortone. Nous pouvons considérer que ces années romaines définirent les orientations futures du goût de Mazarin : familiarité avec l’antique, parfaite connaissance du milieu des grandes collectionneurs et des mécènes du marché romain, relations avec des artistes de renom, désir de grandeur et de magnificence, goût du beau et de la collection. Surtout, facette peu connue du personnage, il fut le fournisseur des Grands. Indirectement, il assura un rôle de courtier en objets d’art notamment pour le cardinal Antonio Barberini, pour lequel il rechercha nombre de tapisseries ; ou bien pour la cour de France comme le prouve une grande partie de sa correspondance, ses compétences reconnues s’étendant à des domaines très variés : mobilier, peintures, antiques ou tapisseries comme nous venons de l’écrire. Vers les années 1634, il acheta nombre de tableaux pour son ami anglais Lord Walter Montagu, familier du duc de Buckingham et ami de la duchesse de Chevreuse. Arrivé en France en 1639 afin d’entrer au service de Richelieu, il emportait à cette occasion nombre de cadeaux. La légende commençait !

Votre conférencier :

Docteur en Histoire de l’Art moderne de l’université Michel de Montaigne (Bordeaux 3), enseignant en classes préparatoires, Christophe Levadoux est spécialiste de l’Histoire de l’Architecture et des arts décoratifs français au XVIIIe siècle, à travers notamment le mécénat artistique des princes de Bourbon-Condé. Auteur de nombreux articles scientifiques liés à son sujet de spécialité et au patrimoine auvergnat, sa thèse Louis-Henri de Bourbon (1692-1740), prince des Lumières doit être publiée prochainement en deux volumes (vol 1. Les bâtiments ; vol.2. Les objets d’art). Conférencier reconnu en région Rhône-Alpes-Auvergne, son esprit résolument progressiste et iconoclaste le pousse à vulgariser l’Histoire de l’Art auprès d’un public avide de ses présentations érudites et décalées. Sa devise ? « Le courage a le mérite que l’on se doit pour exister » Sonia Lahsaini.

Les dates à retenir :

Avril 1639 : arrivée à Paris

5 décembre 1642 : Premier ministre d’État

5 septembre 1638 : Naissance de Louis XIV

16 décembre 1641 : Mazarin nommé cardinal par le Pape

13 mai 1648 : Le parlement veut réformer l’État

26 août 1648 : Début de la Fronde

5 janvier 1649 : Fuite de la famille royale à Saint-Germain

8 février 1649 : Condé assiège Paris.

11 mars 1649 : Les frondeurs signent la paix de Rueil

18 août 1649 : Entrée triomphale du roi à Paris.

18 janvier 1650 : Début de la Fronde des princes

18 janvier 1650 : Arrestation de Condé, Conti et le duc de Longueville.

8 février 1651 : La tentative d’évasion de la reine échoue

7 septembre 1651 : Louis XIV est majeur

21 octobre 1652 : La famille royale rejoint la capitale

1 février 1653 : Retour de Mazarin

7 juin 1654 : Couronnement de Louis XIV

9 mars 1661 : Mort de Mazarin

À lire pour aller plus loin :

Olivier Poncet, Mazarin, l’art de gouverner, Paris, BNF éditions, 2021.

Isabelle de Conihout, Michel (Patrick), Mazarin les Lettres et les Arts, Paris, Monelle Hayot, 2006.

Patrick Michel, Mazarin, prince des collectionneurs, Paris, RMN, 1999.