Jackson Pollock, le geste créatif. À l'occasion de l'expo au Musée Picasso-Paris

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Jackson Pollock est sans doute le plus célèbre des peintres américains des années 1950. Il est vrai que sa pratique très gestuelle nous a livré des toiles innovantes, couvertes de résilles colorées qu’on ne sait dans quel sens regarder, de coulures de peintures, de traces de chiffons, d’empreintes de chaussures... L’artiste a réalisé une œuvre où prime le geste du peintre qui laisse la matière s’exprimer par elle-même : « Un tableau a sa vie propre. J’essaie de la laisser émerger. » Pour parvenir à ce surgissement, Pollock se nourrit de tout ce qui l’entoure : des œuvres de Picasso, l’art des muralistes mexicains, les totems et les masques inuits, les peintures sur sable des Navajos, les audaces des artistes surréalistes et jusqu’aux concepts des psychanalystes jungiens. Tous ces éléments s’entrechoquent, se répondent et se transforment les uns les autres pour aboutir à une expression personnelle. Cette approche nouvelle de la peinture résonne dans toute une génération de peintres et fera entrer la création picturale dans une nouvelle modernité, celle de l’expressionnisme abstrait.

L’exposition que le musée Picasso Paris consacre aux premières années de création de Jackson Pollock, est l’occasion de revenir sur la carrière de cet artiste intrigant et passionnant.

Image : Musée Picasso Paris.

 

Votre conférencière :

Nathalie Douay est historienne de l'art et conférencière nationale.


Les dates à retenir :

1912 : naissance le 28 janvier de Jackson Pollock au Wyoming. La famille déménage souvent au gré des travaux que le père ouvrier trouve. Il a quatre frères aînés dont deux l’encourageront dans la voie artistique.

1928 : il suit, de manière très mouvementée, des études d’art dans une école de Los Angeles.

1930 : Pollock s’est installé à New-York où, après avoir pris des cours de sculpture, il entre dans l’école de Thomas Hart Benton, peintre régionaliste qui lui fait découvrir l’art de la fresque, de la Renaissance aux muralistes mexicains contemporains. Pollock traverse régulièrement les États-Unis pour rendre visite à sa famille sur la Côte Ouest : il est très touché par la vie des Américains, rendue difficile par la Grande Dépression de 1929.

1933 : Pollock se tourne vers le modelage et la sculpture. Finalement, à la mort de son père et surtout après avoir vu une fresque de Rivera, il décide de revenir à la peinture qu’il avait délaissée. Néanmoins, en 1935, la ville de New-York l’embauche dans un programme d’aide aux artistes nécessiteux, en tant que tailleur de pierre pour restaurer des monuments publics.

1936 : il visite l’exposition Cubisme and Abstract Art au MoMA. Il y voit des œuvres de Picasso qui le marqueront profondément. Il visite également l’exposition Fantastic Art, Dada, Surrealism. Il rejoint l’atelier expérimental du peintre muraliste Alberto Siqueiros et se rend au Darmouth College voir les fresques de José Clemente Orozco.

1937 : Pollock rencontre John D. Graham qui vient de publier un article qui exercera une influence décisive sur son travail, Primitive Art and Picasso. En 1939, le MoMA lui consacre une exposition rétrospective (Picasso : Forty years of His Art) avec la présentation de Guernica, grande source d’inspiration pour Pollock. De la même manière, il sera marqué en 1941 par la présentation au MoMA de l’exposition Indian Art of the United States.

Parallèlement à ces années-là, Pollock suit des traitements et des analyses pour traiter son alcoolisme par lesquels il s’approche des thèses jungiennes. Il est également très intéressé par le mouvement Surréaliste, rencontre des artistes exilés d’Europe, s’essaie à l’écriture automatique.

1943 : Pollock participe au Spring Salon for Young Artists où il est repéré par Piet Mondrian qui le signale à Peggy Guggenheim. La célèbre galeriste lui organise sa première exposition personnelle, décide de lui verser une pension mensuelle et lui commande une œuvre monumentale pour l’entrée de sa résidence. Sa carrière est lancée. Le MoMA lui achète une toile l’année suivante.

1945 : tandis qu’il expose à nouveau chez Peggy Guggenheim, il déménage avec sa femme, l’artiste peintre Lee Krasner, dans une ancienne ferme à Long Island. Il y entreprend ses séries de dripping – grandes toiles travaillées au sol par des éclaboussures de peinture.

1950 : Hans Namuth lui consacre un reportage photo qui contribuera à sa célébrité. Il est sélectionné pour représenter les États-Unis à la Biennale de Venise. Il est alors considéré comme l’un des principaux représentants de la jeune création américaine dans son expression la plus radicale : l’action painting.

1956 : Pollock se tue dans un accident de voiture le 11 août, à l’âge de 44 ans.

 

À lire pour aller plus loin :

Jackson Pollock : les premières années, catalogue d’exposition au musée Picasso, éditions Flammarion, 2024.

Cédric Bru (roman), Les irascibles – Pollock, De Kooning, Rothko et les autres, éditions du Cherche Midi, 2023.

Béatrice Joyeux-Prunel, Naissance de l’art contemporain. 1945-1970. Une histoire mondiale, CNRS éditions, 2021.

Barbara Hess, expressionnisme abstrait, Taschen, 2016.

Jackson Pollock: A Catalogue Raisonné of Paintings, Drawings and Other Works, The Pollock-Krasner Foundation, 4 volumes, 1995.