Le Palais Rohan, joyau de l’architecture du XVIIIème siècle à Strasbourg
Strasbourg qui était demeurée ville libre à l’issue de la guerre de Trente ans capitule en 1681 lors du siège mené par les troupes françaises, ce qui conduit à son rattachement au royaume de France. Celui-ci avait déjà absorbé le reste de l’Alsace, en 1648, lors du traité de Westphalie. La cathédrale est rendue aux catholiques et au sein de cette ville marquée par le grès rouge, le style français dont le château de Versailles est alors l’emblème, va s’imposer à travers la construction du Palais Rohan. Après la mort de Louis XIV, c’est sous Louis XV que sera érigé ce nouveau palais épiscopal entre la cathédrale et les berges de l’Ill. Le cardinal Armand-Gaston de Rohan-Soubise, prince-évêque de Strasbourg est un brillant homme de cour cherchant à traduire dans la pierre la dimension ecclésiastique, politique et mondaine de sa fonction. Robert de Cotte, élève de Jules Hardouin-Mansart et premier architecte du roi, auteur de la chapelle royale du château de Versailles, est chargé de la réalisation des plans du palais. Le chantier est dirigé par Joseph Massol entre 1731 et 1742 alors que Robert de Cotte meurt en 1735. Véritable joyau architectural, le palais est bâti dans un style classique devenu à la mode après la conquête de Strasbourg, faisant émerger le raffinement du goût français en terre rhénane. L'étage noble comprend deux enfilades d'appartements. Au Nord, côté cour d'honneur, celui du prince-évêque, et au Sud, côté terrasse, celui réservé au roi et aux hôtes de marque que le cardinal recevait au nom du souverain. Au cœur de cette aile, la chambre du roi est à l’image de celle de Versailles. Alors que l’extérieur est encore fortement marqué par la rigueur classique, l’intérieur permet la naissance d’un art rocaille aux sinueuses moulures qui inspireront d’autres constructions. Plusieurs demeures strasbourgeoises construites après la Palais Rohan permettent d’observer cette évolution architecturale comme la maison Spach ou la maison Saré, rue du Dôme. Ces élégantes façades sont ornées de mascarons évoquant vertus et figures mythologiques, et se parent de courbes et contrecourbes à l’image du mobilier raffiné du style Louis XV.
Votre conférencière :
Anne Vuillemard-Jenn est docteur en histoire de l’art, enseignante et chercheur indépendant. Membre du Groupe de Recherches sur la Peinture Murale, elle poursuit des recherches sur la polychromie architecturale et la peinture monumentale.
Les dates à retenir :
1674 : naissance d’Armand-Gaston de Rohan.
1681 : rattachement de la ville de Strasbourg au Royaume de France.
1715 : mort de Louis XIV.
1731-1742 : construction du Palais Rohan.
1735 : mort de Robert de Cotte.
1751 : construction de la Maison Spach.
1753-54 : construction de la Maison Saré.
1791 : acquisition du palais Rohan par la ville de Strasbourg.
1806 : le Palais Rohan, offert à Napoléon, devient palais impérial.
1920 : le palais est classé Monument historique.
Les appartements du roi et de l’évêque font aujourd’hui partie du Musée des Arts décoratifs.
À lire pour aller plus loin :
Jean-Daniel Ludmann, Le Palais Rohan de Strasbourg, Éditions des Dernières Nouvelles d'Alsace, Strasbourg, tome 1, 1979 ; Tome 2, 1980.
Étienne Martin, Marc Walter, Le Palais Rohan, Éditions des musées de Strasbourg, Strasbourg, 2012.
Bernadette Schnitzler, Histoire des musées de Strasbourg, éditions des musées de Strasbourg, 2009.