Les christianismes orientaux, entre richesse et diversité. L'église copte
Art copte, période copte, tissus coptes, icônes coptes… Quel terme n’a pas le droit à son épithète se rapportant aux chrétiens d’Égypte. Ce mot, issu de l’égyptien hiéroglyphique et transmis par le grec, désigne finalement, lors de la conquête arabe de la première moitié du VIIème siècle, les Égyptiens, la population autochtone de la vallée du Nil majoritairement chrétienne. Malgré l’islamisation de cette terre, les chrétiens y demeurent majoritaires jusqu’au milieu du XIIIème siècle, lors de l’avènement de l’Empire mamlouk.
Après l’intérêt que ces chrétiens soulevèrent auprès des voyageurs occidentaux qui visitèrent l’Égypte, c’est la publication de la Description de l’Égypte qui permit, dans le sillage de la naissance des études égyptologiques, de témoigner d’une population copte dotée d’une tradition architecturale et de coutumes ancestrales jusque-là méconnues. Dans la seconde moitié du XIXème siècle, avec l’organisation des fouilles archéologiques et la fondation du Musée égyptien sous l’égide d’Auguste Mariette Pacha, un élan fut donné archéologiques sur les sites chrétiens. Des fouilles sont alors entreprises dans le monastère Saint-Jérémie de Saqqara, dans le Fayoum, à Akhmîm ou encore, au début du XXème siècle, dans le monastère de l’Apa Apollô de Baouît. Des collections d’antiquités et de papyrus commencent alors à se constituer un peu partout dans le monde. Au Caire, les découvertes archéologiques chrétiennes sont déposées au Musée égyptien tandis que le Comité de conservation des monuments de l’art arabe contribue à la fondation du Musée copte en 1910, sous la direction de Marcus Simaïka Pacha.
Terre biblique, l’Égypte est la source de nombreuses traditions chrétiennes aussi bien culturelles qu’artistiques qui a notamment vu naître le monachisme. Toutefois, les diverses notions que l’on rattache au terme copte ne sont pas nécessairement religieuses. L’exemple des portraits ou des textiles démontre que l’art copte n’est pas qu’un art chrétien mais qu’il peut également revêtir une dimension profane. Que ce soit à la période byzantine (Vème-VIIème siècle) ou sous domination musulmane, les coptes sont conditionnés par leur milieu naturel caractérisé par le Nil, par leurs objets du quotidien et par leur langue parlée et écrite, ultime évolution de l’égyptien ancien.
Votre conférencier :
Ancien élève de l’École du Louvre, Julien Auber de Lapierre est docteur en histoire de l’art de l’École pratique des hautes études. Sa thèse a porté sur le renouveau de l’iconographie chrétienne en Égypte ottomane. Membre du Centre d’études en sciences sociales du religieux (UMR 8216, EHESS/CNRS), il est responsable du Catalogue général du Musée copte du Caire pour les objets en bois dont il a publié le premier volume à l’Institut français d’archéologie orientale (Ifao) en 2018. Pour ce dernier, il dirige également un projet d’étude du matériel archéologique du monastère grec du Pempton découvert dans les années 1960 (Dekheila, gouvernorat d’Alexandrie). Chargé d’expositions au Collège de France, il a été co-commissaire de l’exposition « Champollion 1822, et l’Égypte ancienne retrouva la parole », en 2022, et commissaire de l’exposition « Vins, huiles & parfums : voyage archéologique autour de la Méditerranée antique » en 2024-2025. Chargé de cours à l’université de Strasbourg et spécialiste de l’histoire des collections coptes, il prépare actuellement la publication de l’histoire du fonds papyrologique grec et copte de la Bibliothèque nationale de France.
Les dates à retenir :
31 av. J.-C. : Octave conquiert l’Égypte, qui devient province romaine sous sa dépendance directe.
40-49 apr. J.-C. : selon la tradition, saint Marc évangélise l’Égypte.
251-356 (?) : vie de saint Antoine, un des premiers ermites, père de l’anachorétisme (retraite au désert). Après sa mort, fondation du monastère Saint-Antoine près de la mer Rouge.
284-305 : la grande persécution de Diocéltien marque le début de l’« ère des Martyrs », qui correspond au début du calendrier copte (284).
286-346 : vie de saint Pacôme et mise en place du principe de la vie monastique en communauté (dite cénobitique).
313 : édit de tolérance religieuse dit Édit du Milan : liberté religieuse accordée aux sujets de l’Empire.
11 mai 330 : dédicace de Constantinople.
Vers 350 : traduction de la Bible en copte.
380 : le christianisme est proclamé religion d’État par Théodose Ier.
381 : Concile de Nicée. Création du diocèse d’Égypte.
391 : destruction des grands sanctuaires païens d’Alexandrie (dont le Serapeum) ordonnée par le patriarche Théophile
395 : division de l’Empire romain.
431 : Concile d’Éphèse : la doctrine de la Theotokos (Vierge Marie proclamée « Mère de Dieu ») défendue par le patriarche Cyrille d’Alexandrie.
451 : Concile de Chalcédoine contre le monophysisme : sécession des Églises arménienne, égyptienne et syriaque ; création du patriarcat de Constantinople.
639/641 : expansion arabe : conquête de l’Égypte.
658-750 : dynastie omeyyade à Damas. L’Égypte est dirigée par des gouverneurs.
868-905 : dynastie locale toulounide.
969-1171 : dynastie fatimide. Fondation du Caire par le calife al-Mu‘izz.
996-1021 : persécution du calife al-Hakim.
1047-1077 : le patriarche Christodulos transporte le siège du patriarcat d’Alexandrie au Caire.
1171-1250 : Saladin et la dynastie ayyoubide.
1250-1517 : dynastie mamlouke.
1517 : conquête ottomane de l’Égypte.
A lire pour aller plus loin :
Julien Auber de Lapierre, Adeline Jeudy, Catalogue général du Musée copte du Caire, Objets en bois 1, BEC 26, Institut français d’archéologie orientale, 2018.
Dominique Bénazeth, Marie-Hélène Rutschowscaya, L’art copte en Égypte : 2000 ans de christianisme, Institut du monde arabe, 15 mai – 3 septembre 2000, Paris, Gallimard, 2000.
Une autre Égypte – collections coptes du musée du Louvre, Le Mans – Millau, Somogy éditions d’art, 2009.
Anne Boud'hors et Chantal Heurtel, Frangué, moine d’Égypte – Une correspondance sur terre cuite au VIIIe siècle, coll. « Patrimoine orthodoxe », éditions Lis & Parle, 2016.
Massimo Capuani, Otto Meinardus, Marie-Hélène Rutschowscaya, L’Égypte copte, Citadelles & Mazenod, 1999.
Rahaëlle Ziadé, Chrétiens d’Orient, 2000 ans d’histoire, Institut du monde arabe, 26 septembre 2017 – 14 janvier 2018, Gallimard, 2017.
L’art des chrétiens d’Orient de l’Euphrate au Nil, Citadelles & Mazenod, 2022.
Cette conférence est incluse dans le coffret de 3 visioconférences Les christianismes orientaux, entre richesse et diversité.