Le Palais des Doges : symbole de la splendeur vénitienne
S’il fallait citer deux bâtiments constitutifs du mythe de Venise, alors le choix se porterait sans doute vers la Basilique Saint-Marc et le palais des Doges. Mais si la Basilique fut le haut-lieu de la spiritualité à Venise dès le IXème siècle, le palais des Doges fut pour sa part l’expression visible de l’ambition temporelle et politique de la Sérénissime. Le Palais tel que nous le voyons aujourd’hui, fut bâti pour l’essentiel entre le XIVe et le XVe siècle sur l’emplacement d’un palais-forteresse détruit lors d’un incendie en 971. Bien que l’on parle de « palais des Doges », on ne saurait le réduire à une simple résidence ducale. La plus grande part de ce gigantesque ensemble était en effet dédiée avant tout à l’accueil des institutions de la République de Venise avec lesquelles il est vrai le Doge faisait corps… Extérieurement le palais des Doges se présentait comme un bâtiment de style gothique tardif aligné sur le quai donnant sur la lagune et constitué d’une façade polychrome, longée par une double galerie sculptée, le tout associé à des éléments byzantins, islamiques et classiques. Le gothique de Venise ! A l’intérieur, le palais était composé d’une suite de grandes salles magnifiquement décorées de plafonds ouvragés et de peintures monumentales. La salle la plus significative était la Salle dite du Grand Conseil où les patriciens étaient admis à participer aux réunions hebdomadaires dans un décor somptueux réalisé par les plus grands artistes de Venise Véronèse, Tintoret et Palma Le Jeune. Une démesure qui était à la hauteur des ambitions de Venise ! C’est aussi au palais des Doges que la justice était rendue. Loin des boiseries et des ors des salles de prestige, il y avait donc aussi les cachots humides, les « piombi » (plombs) d’où Casanova s’évadera la nuit du 31 octobre 1755 ! Autre ans plus tard, ce fut la chute de la République de Venise et la perte d’une indépendance défendu durant onze siècles. Dès lors le palais des Doges vidé de sa dimension symbolique ne sera plus que le siège d’une administration dominée par les Autrichiens ou les Français. Il faudra attendre 1924, pour que ce qui fut - selon l’expression d’une historienne d’art - « l’expression visible de l’essence même de Venise » soit transformé en musée et ouvert au public.
Votre conférencier :
Diplômé de l’École du Louvre et de l’université Paris-IV-Sorbonne, Fabrice Delbarre est Guide conférencier-national.
À lire pour aller plus loin :
Elisabeth Crouzet-Pavani, Venise triomphante. Les horizons d'un mythe, 1999.
Alessandra Zamperini, La Palais des Doges, Seuil, 2014.