Paul Gauguin et la Polynésie

Image représentant la conférence  Paul Gauguin et la Polynésie

« Puisse venir le jour où j'irai m'enfuir dans les bois sur une île d'Océanie, vivre là d'extase, de calme et d'art. Entouré d'une nouvelle famille, loin de cette lutte européenne après l'argent. Là à Tahiti, je pourrai au silence de belles nuits tropicales, écouter la douce musique murmurante des mouvements de mon cœur en harmonie amoureuse avec les êtres mystérieux de mon entourage. Libre enfin, sans souci d'argent et pourrai aimer, chanter et mourir ». Lettre de Paul Gauguin à son épouse Mette. février 1890.

Marqué par les ruptures et le déracinement depuis sa plus tendre enfance, Paul Gauguin n'a jamais cessé de voyager. Il a séjourné en Amérique du Sud, en différentes régions de France et d'Europe, aux Antilles, et puis en Océanie où il s'est éteint, marginalisé, épuisé, malade. Car, dans sa quête d'un lieu propice à son épanouissement artistique, Gauguin était aussi un homme en fuite, un homme profondément rebuté par la civilisation moderne, ses contraintes et ses attachements. La figure du « Barbare », du « Sauvage », du « Primitif », exempt de toute influence occidentale jugée délétère, est ainsi déterminante chez lui. Il s'est rêvé en descendant de l'empereur aztèque Moctezuma, il s'est encore identifié à la redoutable déesse tahitienne Oviri, celle dont une copie de la statue qu'il avait produite veille aujourd'hui sur sa tombe dans le cimetière d'Atuona à Hiva Oa, aux Marquises, son dernier atelier sous les tropiques.

« Je pars pour être tranquille, pour être débarrassé de l'influence de la civilisation. Je ne veux faire que de l'art simple, très simple; pour cela j'ai besoin de me retremper dans la nature vierge, de ne voir que des sauvages, de vivre leur vie, sans autre préoccupation que de rendre, comme le ferait un enfant, les conceptions de mon cerveau avec l'aide seulement des moyens d'art primitifs, les seuls bons, les seuls vrais ». Interview à L'Écho de Paris, 23 février 1891.

Mais à quel prix tout cela ? Gauguin a dû quitter les siens, ses proches, et tous ses amis, en pensant trouver au bout un havre où assouvir librement, égoïstement, ses passions : passions sensorielles, passions charnelles, passion de l'art. Une quête de liberté totalement vaine cependant, car, malade et désespéré, proche de la fin, quand il projette un dernier retour, ses amis l'en dissuadent car il ne s'appartient plus : « Vous êtes cet artiste légendaire qui du fond de l'Océanie envoie ses œuvres déconcertantes, inimitables, œuvres définitives d'un grand homme pour ainsi dire disparu du monde. Vos ennemis (et vous en avez bon nombre, comme tous ceux qui gênent les médiocres) ne disent rien, n'osent vous combattre, n'y pensent pas : vous êtes si loin !... Vous jouissez de l'immunité des grands morts, vous êtes passé dans l'histoire de l'art. » Lettre de Georges Daniel de Monfreid à Paul Gauguin, 1902.


Votre conférencier :

Après une formation universitaire en histoire et en socio-anthropologie, Arnaud Hédouin se consacre à l'activité de guide-conférencier. À ce titre, il accompagne des groupes à l'étranger depuis plus de vingt ans avec l'ambition de faire découvrir l'histoire, la culture mais aussi les structures sociales des pays visités.


Les dates à retenir :

1848 : Naissance à Paris d'Eugène Henri Paul Gauguin.

1849–1855 : Enfance au Pérou.

1866 : Tour du monde maritime sur le Chili en tant que second lieutenant.

1874 : Fait la connaissance des Impressionnistes.

1884-85 : Séjour à Copenhague dans la famille de sa femme Mette.

1887 : Voyage à Panama puis à la Martinique.

1888 : Séjour à Pont-Aven puis à Arles chez Vincent Van Gogh.

1891-93 : 1er séjour à Tahiti.

1895 : début de son 2e séjour à Tahiti.

1901 : Installation à Hiva Oa aux Marquises.

1903 : Mort de Gauguin à l'âge de 54 ans.


À lire pour aller plus loin :

Paul Gauguin [1898] Noa Noa, Éditions de l'Aube, La Tour-d'Aigues, 2017.

Ingo Walther, Paul Gauguin, tableaux d'un marginal, Taschen, Cologne, 2013.

Sophie Marin-David, Gauguin à Tahiti, Dossier de l'Art, n°101, « Hors Série », 2003.

Viviane Fayaud, Le Paradis autour de Paul Gauguin, CNRS Éditions, Paris, 2011.