25 octobre 1415 : le désastre d’Azincourt ou l’effondrement de la chevalerie française
Débâcle, déconfiture, effondrement, les qualificatifs malheureux ne manquent pas pour désigner le tournant dramatique que prit la bataille d’Azincourt, le 25 octobre 1415, pour l’armée française. La défaite est cinglante. Elle se solde par la mort de plusieurs milliers de combattants, dont une partie de la fine fleur de la chevalerie française. Les commandants sont humiliés par un échec retentissant dont les échos rappellent les échecs du XIVème siècle. Les lendemains d’Azincourt sont pourtant plus dramatiques encore que ceux de Crécy ou de Poitiers pour les Français. Certains y laissent leur vie, comme le connétable de France Charles d’Albret. D’autres sont faits prisonniers, tel le duc-poète Charles d’Orléans qui passe vingt-cinq ans en captivité. Charles VI, le roi fou, a été incapable de ralentir l’avancée des Anglais. Azincourt leur permet de conquérir la Normandie et de prendre le contrôle de Paris. Le 21 mai 1420, le traité de Troyes déshérite le dauphin Charles et fait du roi d’Angleterre le prochain roi de France. En l’espace de quelques années, la France de la guerre de Cent ans a basculé dans ce qui représente probablement le plus sombre moment de son histoire. Comment ce royaume, qui pourtant ne manquait pas d’arguments pour résister aux Anglais au début du XVème siècle, put se voir infliger une défaite aussi sévère ? Cette conférence, qui s’institue dans une série vouée aux défaites de la guerre de Cent ans, analysera les enjeux et le déroulement de cette bataille fatidique. Il s’agira aussi d’examiner ses suites afin de comprendre comment la France, malgré la crise profonde, sut se relever lentement.
Votre conférencier :
Professeur d’histoire du Moyen Âge en Classes préparatoires à l’École nationale des Chartes, Loïc Cazaux est docteur en histoire médiévale de l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne et agrégé d’histoire. Il est spécialisé dans l’histoire de la guerre et du pouvoir royal à la fin du Moyen Âge. Il a publié différents ouvrages et articles sur les armées et les combattants, le droit de la guerre et la justice, les institutions monarchiques, les confrontations entre les pouvoirs au Moyen Âge.
Les dates à retenir :
1380 : mort de Charles V, auquel succède son fils Charles VI. Mort du connétable Bertrand du Guesclin. Après une décennie de guerre, la France a repris le dessus sur l’Angleterre et a reconquis une partie de l’Aquitaine. Le royaume bénéficie d’une relance qui permet une première reconstruction.
1384 : la mort du comte de Flandre Louis de Male donne à son gendre, le duc de Bourgogne Philippe le Hardi, le comté de Flandre. Les Bourguignons étendent leurs possessions de la Bourgogne au nord du royaume de France. Trêves entre l’Angleterre et la France, renouvelées en 1390.
1385 : mariage entre Charles VI et Isabeau de Bavière.
1392 : première crise de folie du roi Charles VI dans la forêt du Mans.
1400 : montée en puissance des princes dans le royaume. Le duc Louis d’Orléans, frère du roi Charles VI, domine le conseil et s’oppose au duc de Bourgogne Philippe le Hardi, oncle du roi.
1404 : Le duc de Bourgogne Philippe le Hardi venant de mourir, son fils Jean sans Peur lui succède et manifeste son opposition à Louis d’Orléans.
1407 : assassinat à Paris du duc Louis d’Orléans par un homme de duc de Bourgogne. La guerre civile prend de l’ampleur dans le royaume. Parallèlement, la guerre entre la France et l’Angleterre reprend, les Valois s’opposant désormais aux Lancastre en la personne du roi d’Angleterre et duc d’Aquitaine Henri IV, qui a succédé à Richard II Plantagenêt.
1409 : l’influence bourguignonne prend le dessus à Paris jusqu’en 1413. En 1411, le duc de Bourgogne Jean sans Peur tente des négociations avec les Anglais, alors que la capitale est assiégée par les partisans de la maison d’Orléans. Ces derniers sont nommés « Armagnacs », en allusion au beau-père de Charles d’Orléans, fils et successeur de Louis d’Orléans, le connétable Bernard VII d’Armagnac, chef du parti.
1413 : émeutes parisiennes dirigées par Simon le Coutelier, dit Caboche, un boucher parisien. La révolte est dominée par les Bourguignons qui font massacrer des Armagnacs. Une ordonnance de réforme du royaume inspirée de celle de 1357 est promulguée. Mais les Armagnacs reprennent le contrôle de la capitale et l’ordonnance est abolie. Désormais, l’influence armagnaque l’emporte jusqu’en 1418.
1414 : après avoir succédé à son père en 1413, le roi d’Angleterre Henri V de Lancastre revendique devant le Parlement à Westminster la Couronne de France, et relance la guerre.
1415 : en août, Henri V débarque avec son armée en Normandie. Le 25 octobre 1415, l’armée française est écrasée à Azincourt dans le nord de la France. Le duc Charles d’Orléans est fait prisonnier.
1416 : mort du duc Jean de Berry. Son apanage revient à la Couronne. Jean sans Peur reconnaît Henri V comme celui qui doit « devenir roi de France ».
1417 : la flotte française est détruite à Chef-de-Caux. L’armée anglaise débarque à Trouville. La Normandie est conquise par les Anglais.
1418 : siège de Rouen, prise en 1419. Henri V contrôle le duché de Normandie. À Paris, les Bourguignons rentrent dans la capitale, massacrent les Armagnacs, et prennent le contrôle du gouvernement. Le dauphin Charles, futur roi Charles VII, s’enfuie.
1419 : lors de l’entrevue de Montereau, le dauphin Charles fait assassiner le duc de Bourgogne Jean sans Peur. Pontoise est prise par les Anglais.
1420 : le Traité de Troyes négocié avec les Anglais le 21 mai par Isabeau de Bavière et Philippe le Bon, fils du duc de Bourgogne Jean sans Peur, déshérite le dauphin Charles. Sa fille Catherine épouse Henri V, qui est nommé régent et héritier du royaume de France. En décembre, Charles VI et Henri V font leur entrée à Paris. Le dauphin Charles se replie sur le « royaume de Bourges », dans les terres de la Couronne au centre du royaume, autour du Berry. La région parisienne est sous domination anglo-bourguignonne.
1422 : mort d’Henri V puis de Charles VI. Le dauphin Charles se proclame roi de France. Le roi d’Angleterre Henri VI fait de même. Le Parlement de Paris reconnaît le frère d’Henri V, le duc de Bedford Jean de Lancastre, régent du royaume de France, en raison de la minorité de son neveu Henri VI né en 1421. La guerre continue entre les Français et les Anglais, de même que la guerre civile entre Armagnacs et Bourguignons.
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