Le FBI de J. Edgar Hoover

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01_Histoire

Ses agents nous sont familiers, tant ils sont présents sur les écrans de cinéma et dans les séries télévisées. Pourtant, pour fameux qu’il soit, nous connaissons souvent mal le Federal Bureau of Investigation.

Créé en 1908 afin d’enquêter sur les malversations de membres du Congrès par Charles Joseph Bonaparte, petit neveu de l’empereur et procureur général du président Théodore Roosevelt, il demeure dans l’ombre jusque dans les années 1930. C’est la lutte contre la criminalité initiée par un autre président Roosevelt, Franklin Delano, qui le fait connaître du grand public. Sous la houlette de J. Edgar Hoover, qui en est le directeur depuis 1924, le Bureau of Investigation (qui prendra le nom de Federal Bureau of Investigation en 1935) est alors devenu un service moderne et efficace. Ses victoires contre des criminels aussi célèbres que John Dillinger, « Pretty Boy » Floyd ou « Machine Gun » Kelly font de ses « G-men », comme on surnomme maintenant ses agents, des héros modernes que Hollywood s’empresse de porter à l’écran.

Mais le FBI que J. Edgar Hoover dirige pendant près d’un demi-siècle — record absolu de longévité à la tête d’une agence fédérale — n’est pas seulement un service de police criminelle d’élite. Il présente aussi une face plus sombre. Une instruction orale du président Roosevelt, donnée en 1936 pour mettre sous surveillance les communistes et les fascistes, a permis à Hoover, patriote convaincu mais surtout strict conservateur, d’en faire un outil hors pair d’espionnage des Américains. Ses fichiers ont accueilli, de ces années-là jusqu’à sa mort en 1972, tout ce que le pays a connu de « subversifs » à ses yeux : radicaux politiques, partisans des droits civiques ou du droit des Amérindiens, opposants à la guerre au Vietnam, mais aussi environnementalistes, féministes et homosexuels. Pire, Hoover est allé jusqu’à infiltrer ces groupes pour les déstabiliser et les décrédibiliser, au besoin en n’hésitant pas à y créer des dissensions internes, par des méthodes douteuses voire illégales. C’est ainsi que le FBI est devenu un véritable acteur politique, pour le meilleur et pour le pire.


Votre conférencier :

Didier Combeau, agrégé et docteur en civilisation américaine, est essayiste et spécialiste des États-Unis. Ses recherches portent sur les questions de violence et plus généralement sur la politique intérieure. Il a notamment publié Des Américains et des armes à feu : démocratie et violence aux États-Unis (Éditions Belin) et Polices Américaines (Gallimard). Son dernier ouvrage, Être Américain aujourd’hui : les enjeux d’une élection présidentielle, est paru en juin 2020 aux éditions Gallimard.


Les dates à retenir :

1895 : naissance de J. Edgar Hoover à Washington

1908 : création du Bureau of Investigation.

1917 : à l’issue de ses études de droit, J. Edgar Hoover entre au ministère de la justice. Il participe à l’organisation des raids contre les étrangers soupçonnés de bolchevisme ou d’anarchisme organisés par le procureur général Palmer en 1919-1920.

1924 : Hoover est nommé directeur du Bureau of Investigation, dont les missions sont limitées aux enquêtes criminelles. Il le professionnalise et le modernise.

Années 1930 : après l’arrivée de Franklin Delano Roosevelt au pouvoir, le Bureau of Investigation devient le fer de lance de la lutte contre la criminalité. Il prend le nom de Federal Bureau of Investigation en 1935. Ses agents, les « G-men », sont popularisés par Hollywood.

1936 : le président Roosevelt donne à Hoover l’instruction orale d’enquêter sur les « activités subversives » (c’est-à-dire sur les communistes, les fascistes et les espions étrangers).

1947 : le président Truman initie un programme de contrôle de la loyauté des employés fédéraux et le FBI est chargé des enquêtes.

1951 : Hoover institue un « Sex Deviates Program » afin de purger les services fédéraux des employés homosexuels.

1956 : Hoover met en place les programmes COINTELPRO, destinés à infiltrer les milieux « subversifs » non seulement dans un but de renseignement, mais aussi afin de perturber leurs activités.

1972 : mort de J. Edgar Hoover. Quelques mois plus tôt, l’existence des programmes COINTELPRO a été révélée au grand public et ceux-ci ont été interrompus. Les 330 000 pages des fichiers « Sex Deviates » seront détruites en 1977-1978.


À lire pour aller plus loin :

Richard Gid Powers, G-Men: Hoover’s FBI in American Popular Culture, 1983.

Rhodi Jeffreys-Jones, The FBI: A History, Yale University Press, 2007.

Anthony Summers, J.E. Hoover Confidential, La Manufacture de Livres, 2014.

Athan G. Theoharis (dir.), The FBI: A Comprehensive Reference Guide, from J. Edgar Hoover to The X-Files, The Oryx Press, 2000.

Tim Weiner, Enemies: A History of the FBI, Random House, 2012.



vendredi 21 avril 2023 à 10:00

Didier Combeau

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