Les caravagesques français, de Valentin de Boulogne à Nicolas Tournier

Image représentant la conférence  Les caravagesques français, de Valentin de Boulogne à Nicolas Tournier
02_Histoire de l’art

Au tournant du siècle, la plupart des peintres français achèvent leur formation par un séjour à Rome ou en Italie. Le nouvel attrait pour l’art antique et les innovations apportées par les grands maîtres de la Renaissance attirent un florilège d’artistes étrangers. De plus, la Rome des papes, celle de l’Eglise catholique réformée est propice aux commandes. Les chantiers pullulent et offrent aux peintres des travaux de prestige. Mais en ce début du XVIIème siècle, ce ne sont pas toujours les grands chefs-d’œuvre des peintres classiques qui influencent les jeunes maîtres. La cité éternelle a récemment été bouleversée par la peinture naturaliste du Caravage qui a déchainé les passions. Bon nombre de ses chefs-d’œuvre ornent encore les églises de Rome tels les trois tableaux de la chapelle Contarelli relatant la vie de saint Matthieu, la Madone aux Pèlerins de l’église Sant’ Agostino ou encore la Conversion de Saint Paul et la Crucifixion de saint Pierre pour la chapelle Cerasi de l’église Santa Maria in Popolo. Mais sa fuite subite de Rome en 1606 ainsi que sa mort prématurée en 1610 ont plongé les amateurs de son art dans la frustration. Un véritable marché « caravagesque » s’ouvre à ses copieurs ainsi qu’à ses suiveurs.


Le quartier des maîtres français se trouve à proximité de Saint-Louis-des-Français. Ainsi, lorsque les jeunes peintres arrivent dans la cité éternelle, ils se sont rapidement confrontés aux retables du maître. De plus, peindre à la manière du Caravage peut attirer les anciens grands mécènes de l’artiste tels le cardinal del Monte, le pape Urbain VIII Maffeo Barberini, son neveu Scipione Borghese, ou encore le marquis Giustiniani. Il est de bon ton de posséder sa version de la Diseuse de bonne aventure, son David, ou son Reniement de saint Pierre. Plusieurs maîtres français deviennent ainsi les spécialistes de cet art caravagesque au sein duquel les thèmes les plus fameux, traités par le grand maître son repris et parfois complètement réinterprétés. De nouveaux sujets apparaissent contenant les fameux personnages de Michelangelo tels les Corps de garde, ou scènes de tavernes. Quelques peintres français excellent dans cette manière caravagesque comme Simon Vouet (1590-1649), Valentin de Boulogne (1591-1632), Claude Vignon (1593-1670), ou Nicolas Tournier (1590-1639) … y ajoutant leur touche française et autres influences, au gré de leurs voyages.


Votre conférencière :

Docteure en Histoire de l’Art, Elsa Trani a enseigné pendant dix ans au sein des universités de Montpellier et d’Aix-en-Provence. Spécialisée dans la peinture ancienne, sa carrière a débuté en tant qu’assistante de conservation au musée Fabre de Montpellier ainsi qu’au contact des conservateurs de la DRAC Occitanie pour la réalisation de sa thèse de Doctorat portant sur la peinture à Montpellier et dans le Midi aux XVIIème et XVIIIème siècles. Conférencière indépendante en Histoire de l’Art et enseignante en Histoire-Géographie, ses recherches se poursuivent autour de nombreux thèmes : la peinture régionale, les femmes peintres, les académies de peinture, la théorie de l’art, les grands maîtres de la Renaissance italienne…


Les dates à retenir :

1599-1600 : Caravage révolutionne la peinture religieuse avec le décor de la chapelle Contarelli à Saint-Louis-des-Français. Ce décor marque profondément les maîtres français séjournant à Rome.

1606 : Caravage quitte Rome, laissant de nombreux chefs d’œuvre derrière lui.

1609 : Guy François, originaire du Puy-en-Velay se forme au côté de Carlo Saraceni qui a côtoyé Caravage.

1614 : arrivée de Simon Vouet (1590 – 1649) et Valentin de Boulogne (1591 – 1632) à Rome, les artistes s’imprègnent de la nouvelle peinture du Caravage.

1617 : début du séjour romain de Claude Vignon (1593 – 1670), le maître réinterprète quelques sujets du Caravage.

Vers 1620 : Guy François réalise une version caravagesque de la Madeleine pénitente et diffuse ce courant artistique en Languedoc.

1626-1639 : le peintre Nicolas Tournier (1590-1639) diffuse le caravagisme en Languedoc.

1627 : après avoir incarné le chef de file des français à Rome, Simon Vouet est rappelé en France et abandonne le caravagisme.

1629 : Valentin de Boulogne reçoit la prestigieuse commande du Martyr de Saint-Procès et Saint-Martinien pour orner Saint-Pierre de Rome. Ce chef-d’œuvre incarne l’apogée du caravagisme à Rome.

1632 : Valentin de Boulogne s’éteint à Rome. Sa mort rocambolesque incarne la vie dissolue des caravagesques et la fin progressive de ce courant artistique.


À lire pour aller plus loin :

Olivier Bonfait, Après Caravage : une peinture caravagesque ? Hazan, 2012.

Axel Hémery, Jean-Pierre Cuzin, Michel Hilaire, Annick Lemoine, Les caravagesques français, Dijon, Ed Faton, 2001.

Paris, Grand Palais-Rome Villa Médicis, 1973-1974, Valentin et les caravagesques français.

Toulouse, musée Paul Dupuy, 2001, Le temps du caravagisme : la peinture de Toulouse et du Languedoc de 1590 à 1650, par Jean Penent.

New-York, Metropolitan museum, Paris, musée du Louvre, 2017, Valentin de Boulogne, réinventer Caravage.

Montpellier, musée Fabre, Toulouse, musée des Augustins, 23 juin – 14 octobre 2012, Corps et Ombres – Caravage et le caravagisme européen.



vendredi 2 février 2024 à 10:00

Elsa Trani

Formulaire d'inscription